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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


Communication avec le Monde Intérieur
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


 

Dans le mot Soufi comme dans le mot grec sophia, la sagesse est implicitement contenue. La sagesse ne peut être ni d'Orient ni d'Occident, elle n'appartient pas en particulier à une race, une nation ou une croyance. La sagesse est universelle et c'est l'héritage de l'humanité, un héritage divin. Nous confondons souvent sagesse avec intellect; nous appelons parfois sage une personne intellectuelle et parfois habile une personne sage. Pourtant la personne sage est différente de la personne habile. La personne habile est sage dans les affaires du monde, elle est partiellement sage; il y a une part de sagesse qui lui manque: cette part qui ne peut pas être acquise par l'étude ni par la recherche. Ce qui peut être acquis grâce à ce que nous étudions et apprenons est la partie intellectuelle de la sagesse, mais il y a un autre moyen d'obtenir la sagesse, c'est de la puiser en soi-même. Nul doute que cela ne veuille rien dire à celui qui pense que seule la partie intellectuelle de la sagesse peut être acquise, en revanche, celui qui, au-delà des sens physiques, voit quelque chose de secret, caché à nos yeux, celui-là le comprend. Il peut apprendre aussi bien de ce qui est au-dehors que de ce qui est au-dedans de lui. La nature humaine a tendance à pencher d'un seul côté, soit matériel, soit spirituel, et en raison de cette tendance, l'homme découvre dans tous les aspects de sa vie qu'il y a quelque chose d'incomplet. Dans la connaissance qui lui vient de l'extérieur - apprise dans les livres ou par l'expérience - une personne, aussi avancée soit-elle, éprouve parfois une impression d'obscurité et de vide à cause de l'absence d'une autre connaissance qui aurait fait d'elle un être complet, à la satisfaction de son âme.

Au cours de mes voyages en Orient et en Occident, j'ai rencontré d'innombrables âmes désirant toutes connaître ce qui pouvait être appris du monde extérieur. Mais j'ai toujours perçu chez elles la présence de quelque chose qui était continuellement en quête d'une autre forme de connaissance dont le manque leur était parfois connu et parfois inconnu. Une telle connaissance existe-t-elle? Quelle est la nature, le caractère de cette connaissance? D'où vient-elle?

On peut répondre par la question suivante: "D'où vient le langage? Vient-il d'une personne? Existe-t-il une personne qui ait inventé une langue?" Non, aucune. C'est un résultat naturel quand des gens se parlent, c'est ce qui a construit un langage systématisé qui s'est enrichi et qui a été parlé longtemps. Il en est de même avec la connaissance. Non seulement la connaissance extérieure, mais même la connaissance intérieure est un recueil des expériences immémoriales. Tout cela est dans le Mental Divin. Comment peut-on y puiser? De la même façon que la branche d'un arbre tire sa subsistance des racines, si nous représentons nos âmes comme les branches d'un arbre, nous verrons qu'il n'y a qu'une seule racine: le Mental Divin. Chaque goutte de pluie qui tombe sur les feuilles, l'action du soleil sur les feuilles et les branches, tout a un effet conjugué dans la racine qui est le cœur de l'arbre. De la même façon, toute la connaissance est rassemblée dans un seul Mental, le Mental Divin. Et, c'est de ce Mental que, consciemment ou inconsciemment, l'homme peut tirer cette connaissance qui est, dans une certaine mesure, différente de la connaissance qu'il peut acquérir du monde extérieur.

Il n'est pas difficile d'en trouver la preuve. L'intuition n'est pas une chose peu commune. Dans la nature féminine, l'intuition est plus fine que dans la nature masculine. Pour la raison que la pensée d'une femme ne vient pas seulement de la tête mais également du cœur. Il lui est alors facile, quand la connaissance ne vient pas de la tête, de la puiser au-dedans d'elle-même, dans le cœur. On a constaté d'innombrables preuves dans différents pays d'Europe concernant des mères et des épouses de combattants sur les champs de bataille, qui percevaient différents signes de la condition de leurs êtres chers. Quiconque a de l'affection, qui sait ce que veut dire l'amour, le dévouement, la tendresse du cœur, ne peut pas mal comprendre la chose un seul instant. Une certaine connaissance vient à une telle personne, une connaissance qu'elle n'aurait pas pu recevoir par des moyens extérieurs. Quand nous examinons le problème d'un autre point de vue, nous obtenons la confirmation que, comme la vue n'est complète qu'avec les deux yeux, et l’ouïe avec les deux oreilles, de la même façon c'est la connaissance acquise aussi bien au-dedans qu'au-dehors qui donne une sagesse complète. Et cependant bon nombre de personnes sont si absorbées dans la poursuite de la connaissance puisée à l'intérieur qu'elles rêvent dans la vie, vivent dans les nuages et parlent de choses imaginaires. Mais cela n'est pas notre préoccupation. Ce serait aussi envisager les choses d'un seul côté. La sagesse vient de l'équilibre, la vérité vient de l'équilibre. Une personne qui est largement éveillée aussi bien à la lumière intérieure qu'à la lumière extérieure peut être d'une plus grande utilité et c'est elle qui vit plus pleinement.

Si nous nous interrogeons sur ce qui a conduit le monde moderne au désordre de ces dernières années, et sur la cause qui est à l'origine de tout cela, nous constaterons tôt ou tard que, malgré tous ses progrès, l'humanité a perdu son équilibre.

Il y a ceux qui se sont tenus à leur propre croyance spirituelle. D'autres ont pris une direction nationaliste et, sont-ils heureux? Ils ne le sont pas, car ce qui rend heureux n'existe pas sur terre. Cela existe dans l'espace, on pourrait dire: "cela existe dans les cieux". C'est une chose à laquelle il faut atteindre.

Qu'est-ce qui aide l'homme à l'atteindre? L'homme a perdu la notion de la valeur de l'imagination, de la valeur de la pensée. Qu'y a-t-il à atteindre dans ce monde, auquel nous donnons une si grande importance? Nous imaginons qu'un caillou coûte un sou et un diamant des millions. C'est un effet de notre imagination. L'un est plus brillant que l'autre, mais c'est notre imagination qui a fait de l'un une chose aussi précieuse. Par une observation approfondie, nous voyons que ce n'est rien d'autre que de l'imagination. Parfois, nous pensons que certaines choses peuvent valoir tant, et parfois nous accordons cette valeur à d'autres choses. C'est encore un effet de notre imagination. Nous n'occupons notre imagination qu'avec des choses terrestres, intelligibles à notre esprit.

Quant au monde intérieur, nous n'y prêtons guère attention. Nous disons: "Il peut exister comme il peut ne pas exister. Quelle importance?" Mais à la longue, c'est important. C'est important quand il s'agit de vie ou de mort, car alors, toutes les choses autour de nous importent moins que notre propre être.

Alors apparaît peut-être la recherche de soi-même, et l'homme s'interroge: "Qu'est-ce que mon moi si la mort peut l'emporter? Si le moi est plus important et plus grand, je veux découvrir ce qu'il est, y être de plus en plus attentif et parvenir à cette connaissance qu'on peut obtenir de l'intérieur".

Et la question se pose: "Comment cela peut-il être obtenu?" On répondra: en regardant à l'intérieur de soi. Nous avons l'habitude de regarder à l'extérieur. Quand les yeux d'un homme sont ouverts, son attention est attirée par tout ce qui se présente et il n'est pas conscient de ce qui existe au-dedans de lui-même. Quand il est fatigué de tout ce qu'il y a à l'extérieur, il ferme les yeux et alors devant eux se présente tout ce qui a été recueilli dans son mental. De cette façon, simplement en fermant les yeux, le monde intérieur de ses yeux vient à lui. Si cela est vrai, on peut facilement se rendre compte qu'on doit plonger profondément au fond de soi. Ainsi, la sagesse que le message Soufi présente au monde est acquise par cette méthode qui consiste à établir une communication avec le monde intérieur.

Le message Soufi ne donne au monde ni grands principes ni doctrines, il n'apporte pas à l'Occident de nouvelles conceptions; il aide seulement les gens à se découvrir, à trouver l'équilibre et à l'établir dans tout ce qui peut arriver. Point de promesse de richesse ni de santé. Il ne conduit pas aux miracles, aux phénomènes, aux prodiges ; il n'apporte pas une nouvelle voie pour la piété ni pour la spiritualité; il ne fonde pas une communauté ni une nouvelle religion. C'est une façon bien plus large de voir la vie, un point de vue, une attitude. Je pense qu'à la fin le bonheur qui peut être obtenu au fond de soi est le meilleur chemin vers cette paix qui est l'accomplissement de la vie.

 

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Qu'est ce que le Soufisme

  Le Dévoilement de l'Âme

 

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