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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


LA LIBERTÉ D'ACTION
La Vie Intérieure
Chapitre 5
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


Texte original en anglais

A mesure que l'homme se développe par la vie intérieure, il éprouve une liberté de pensée, de parole et d'action qui lui vient naturellement au cours de son voyage spirituel. Pourquoi et d'où lui vient cette liberté peut être expliqué du fait qu'il y a un esprit de liberté caché au fond de l'homme, recouvert par les conventions extérieures. Quand l'homme s'élève au-dessus des conventions extérieures, l'esprit de liberté qui était enfermé jusque là commence à se manifester.

 

Les lois données à l'humanité sont données par ceux qui sont loin des lois: les Aînés. De même que pour les enfants certaines règles sont nécessaires, de même ceux qui ne sont pas assez avancés pour voir la vie de plus haut sont liés par des lois qui leur sont enseignées sous forme de préceptes religieux. Et elles sont aussi nécessaires à l'humanité, que le sont aux enfants les règles données au sein de la famille; sans règles, les enfants deviendraient indisciplinés. L'adulte comprend le pourquoi de ces règles et de quel avantage elles lui ont été, et il peut établir pour lui-même celles qui lui conviennent le mieux.

 

Ainsi la vie intérieure aide l'âme à grandir; quand l'âme évolue de l'assujettissement à la maîtrise d'elle-même, elle établit ses propres règles. C'est pourquoi, en Orient, personne n'essaie de critiquer un être spirituel; personne ne s'élève en juge de ses actes, ni ne l'accuse de quoi que ce soit qui lui paraisse mal à lui-même. Pour cette raison, Jésus-Christ a dit "Ne jugez point". Mais Il voulait dire, ne jugez pas vos semblables. Celui qui est plus avancé sur le chemin de l'évolution, nul ne peut le juger. Lorsque l'homme a tendance à juger un être plus avancé que lui, la conséquence est que le progrès spirituel se détériore, car si avancé que soit cet être, il sera abaissé par ceux qui n'ont pas avancé encore. C'est pourquoi l'humanité, au lieu de s'avancer, recule. Qu'advint-il de Jésus Christ? Il fut jugé par les hommes. L’âme libérée, l'âme rendue libre par la nature divine, fut jugée par le tribunal de l'homme. Des êtres moins évolués se sont octroyés le droit de juger le Christ au nom de leur savoir et, non seulement de Le juger, mais de Le condamner.

 

C'est pourquoi, au cours d'une période quelconque d'une civilisation, la tendance à juger un être spirituel a toujours amené l'effondrement de toute cette civilisation. L'empereur Aurungzeb pria le Soufi Surmad, un grand saint qui vivait à Gwalia, de se rendre à la mosquée, car il était contre les règles de cette époque de s'abstenir de venir aux prières régulières dans la mosquée de l'État. Surmad était un extatique; conscient de Dieu, il vivait chaque instant du jour et de la nuit en communion avec Lui. Oublia-t-il l'ordre reçu, ou refusa-t-il de s'y soumettre? Pour lui, il n'y avait pas d'heure ou de lieu déterminés pour la prière: tout lieu était un lieu de prière, chaque instant était l'heure de la prière; sa respiration même était une prière. Il fut décapité pour insoumission à la loi collective. La conséquence fut que la chute de l'empire du Grand Mogol peut être datée de ce moment: toute la civilisation mogole, unique en son temps s'effondra.

 

Les Hindous ont toujours connu cette philosophie, parce qu'ils avaient une religion parfaite, une religion dans laquelle on prêtait à un aspect de Dieu un caractère humain; et leurs différents Devas ne sont que les différents traits de la nature humaine, chacun d'eux adoré et vénéré. On adorait ainsi non seulement Dieu, mais la nature humaine tout entière sous tous ses aspects; c'est en cela que la religion hindoue est parfaite. Quand on dit: "Ce lieu-ci est saint, celui-là ne l'est pas; ceci est sacré, rien d'autre ne l'est", on fragmente la vie, la vie qui est une, qui ne peut être divisée.

 

Ainsi ceux qui par leur développement intérieur, s'élèvent au-dessus des conventions ordinaires de la vie terrestre, arrivent à une autre conscience. Pour eux, les lois de ce monde sont des lois pour enfants. Ceux qui commencent à percevoir la différence entre les lois qu'ils se sont érigées eux-mêmes et celles qui sont observées par l'humanité, commencent parfois par condamner les lois communes pour les dédaigner ensuite. Ils les critiquent, et demandent: "à quoi bon tout cela?" Mais ceux qui sont devenus plus profondément conscients des lois intérieures respectent même celles des enfants, sachant qu'elles sont pour les enfants et non pour les adultes, et ils les respectent, car ils savent qu'il ne peut en être autrement. Les lois qu'ils connaissent ne se révèlent qu'à l'être qui s'est élevé à cette conscience, mais avant d'avoir atteint cette hauteur, l'âme a besoin d'une loi qui lui permette de vivre dans l'harmonie. Les âmes évoluées respectent donc ces lois et les observent lorsqu'elles sont dans une communauté. Elles ne les condamnent ni ne les critiquent. Elles se rendent compte que l'harmonie tient la première place dans la vie, et que l'on ne peut être heureux sur terre si l'on ne peut vivre en bon accord avec son entourage. Quel que soit notre degré d'évolution, quel que soit notre point de vue dans la vie et quelle que soit notre liberté, nous devons toujours respecter les lois de la majorité.

 

La question se pose maintenant de savoir si les êtres spirituellement avancés conçoivent les règles morales d'une manière particulière? Oui vraiment, et leurs préceptes moraux sont élevés et beaucoup plus grands que le commun des hommes ne peut en avoir l'idée. Le fait qu'ils se soient libérés, en esprit, des lois de la communauté, ne les libère pas de leurs propres lois. Ils sont liés par leurs lois particulières qui sont beaucoup plus élevées et plus grandes que les lois collectives. Il est évidemment possible que leurs idées morales soient critiquées et que tout le monde ne les comprenne pas. Cependant leur morale se rapproche plus de la nature que les lois collectives; leurs lois sont conformes à l'Esprit; elles ont une action concrète qui se présente comme un phénomène. En respectant deux morales contraires: les lois collectives et leurs propres lois, ils arrivent à un plan et se trouvent dans une condition où ils sont cloués, pieds et mains. C'est le sens symbolique de la crucifixion du Christ.

 

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