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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


VIBRATIONS
Mysticisme du son
Chapitre 2
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


Texte original en anglais

La vie silencieuse fait son expérience à la surface par l'activité; elle paraît morte en comparaison de la vie active de la surface. Pour le sage seulement, la vie éternelle paraît préférable à la vie mortelle impermanente et peu durable. La vie en surface semble être la vie réelle car c'est en cette vie que se fait l'expérience de toute joie.

 

Dans la vie silencieuse il n'y a pas de joie, mais paix seulement. L'être originel de l'âme est paix et sa nature est joie, l'un s'opposant à l'autre; et c'est la cause cachée de toute la tragédie de la vie. Originellement l'âme est dépourvue de toute expérience; elle expérimente tout en ouvrant les yeux au plan extérieur, son regard ne portant que sur la vie en surface et s'y complaisant jusqu'à pleine satisfaction. Puis l'âme ferme les yeux au plan extérieur et recherche constamment la paix, l'état originel de son être.

 

La partie intérieure et essentielle de chaque être est composée de vibrations subtiles et sa partie extérieure de vibrations grossières. Nous appelons esprit la partie la plus subtile et matière la plus grossière; le premier étant moins sujet au changement et à la destruction que la seconde. Tout ce qui vit est esprit, tout ce qui meurt est matière; tout ce qui, dans l'esprit, meurt est matière et tout ce qui vit dans la matière est esprit. Tout ce qui est visible et perceptible paraît être vivant, bien que sujet à la mort et la décomposition, se transformant sans cesse en son élément le plus fin. C'est l'esprit qui vit réellement, voilé sous la matière; mais la vision de l'homme est si abusée par l'attention qu'il attache au monde apparent, que son être véritable est caché. C'est l'activité croissante qui cause la matérialisation des vibrations et c'est la décroissance graduelle qui, à nouveau, les transforme en esprit. Comme on l'a déjà dit, les vibrations traversent cinq phases distinctes durant leur changement de l'état subtil à l'état grossier, et les éléments de l'éther, l'air, le feu, l'eau et la terre ont chacun une saveur, une couleur et une forme qui leur sont particuliers. Cette rotation des éléments les amène tous à la surface en temps voulu. A chaque degré de leur activité, ils varient et deviennent distincts l'un de l'autre. C'est le groupement de ces vibrations qui produit la variété dans le monde objectif et l'homme appelle destruction la loi qui les force à se disperser.

 

Les vibrations se transforment en atomes et les atomes engendrent ce que nous appelons vie. Il arrive ainsi que leur groupement, par le pouvoir d'affinité de la nature, forme une entité vivante et lorsque le souffle se manifeste dans la forme, le corps devient conscient. Bien des êtres ténus et subtils se cachent dans un individu: dans son sang, les cellules de son cerveau, sa peau, dans tous les plans de son existence. Dans l'existence physique d'un individu, beaucoup de petits germes naissent et se nourrissent qui n'en sont pas moins des êtres vivants; de même dans son plan mental vivent bien des êtres nommés Mawakals, ou élémentaux. Ce sont des entités encore plus délicates nées des propres pensées de l'homme; et de même que les germes vivent dans son corps physique ainsi les élémentaux habitent sa sphère mentale. L'homme imagine souvent que les pensées n'ont pas de vie; il ne voit pas qu'elles sont plus vivantes que les germes physiques, qu'elles ont une naissance, une enfance, une vieillesse et une mort. Suivant leur nature, elles travaillent pour le bien de l'homme ou à son détriment. Le Soufi les crée, les façonne et les contrôle. Il les exerce et les dirige à travers sa vie; elles forment son armée et accomplissent ses désirs. Comme les germes constituent l'être physique de l'homme et les élémentaux sa vie mentale, ainsi les anges constituent son existence spirituelle. On les nomme «Farishtas».

 

En principe les vibrations ont longueur aussi bien que largeur; elles peuvent durer moins de la fraction d'un instant ou la plus grande partie de l'âge de l'univers. Elles créent différentes formes, figures et couleurs à mesure qu'elles se manifestent, une vibration engendrant une autre; ainsi des myriades émanent d'une seule. Par là il se forme des cercles englobés sous des cercles et des cercles englobant d'autres cercles et dont la totalité forme l'univers. Chaque vibration une fois manifestée se fond à nouveau dans sa source originelle. L'extension des vibrations est en rapport avec la subtilité du plan de leur point de départ. Pour parler plus clairement, le mot prononcé par les lèvres ne peut atteindre que les oreilles de celui qui écoute; mais la pensée procédant de l'esprit, s'élançant de l'esprit à l'esprit, possède une grande portée. Les vibrations de l'esprit sont beaucoup plus puissantes que celles des mots. Les sentiments sincères d'un cœur peuvent pénétrer le cœur d'un autre, ils parlent en silence, s'épandent dans la sphère au point que l'atmosphère même qui se dégage d'une personne proclame ses pensées et ses émotions. Les vibrations de l'âme sont les plus puissantes et celles qui s'étendent le plus loin; tel un courant électrique, elles courent d'âme à âme.

 

Toutes choses et tous êtres dans l'univers sont reliés les uns aux autres et dans tous les plans d'existence, visiblement ou invisiblement, et c'est au moyen des vibrations qu'il s'établit entre eux une communication. Il en existe un exemple courant: lorsqu'un individu tousse ou baille dans une réunion, beaucoup d'autres commencent à l'imiter; ce qui se présente aussi dans les cas du rire, l'excitation et la dépression. C'est la preuve que les vibrations transportent des états d'être d'une personne à une autre. Celui dont la vue est pénétrante connaît donc le présent, le passé, le futur et perçoit les conditions de tous les plans d'existence.

 

Les vibrations agissent au moyen du lien de sympathie qui se crée entre un homme et son entourage; elles révèlent les conditions passées, présentes et futures; et c'est l'explication des hurlements du chien annonçant la mort et des hennissements du cheval à l'approche du danger. C'est le fait non seulement des animaux, mais les plantes même se meurent dans les temps de douleur et les fleurs se fanent, alors que durant les époques de bonheur elles poussent et fleurissent. La raison pour laquelle les plantes et les animaux peuvent percevoir les vibrations et connaître la venue des événements, alors que l'homme en est ignorant, vient de ce que ce dernier s'est aveuglé par son égotisme. L'influence des vibrations reste sur la chaise où l'on s'est assis, le lit où l'on a dormi, la maison où l'on vit, les vêtements qu'on porte, la nourriture qu'on mange et même la rue où l'on marche.

 

Toute émotion surgit de l'intensité de l'activité des vibrations qui, agissant en différentes directions, produisent des émotions différentes, la principale cause de toute émotion étant seulement l'activité. Chaque vibration en état d'activité amène la conscience à la surface extérieure et le brouillard causé par cette activité assemble les nuages que nous nommons émotions. Les nuages de l'émotion obscurcissent la clarté de la vue de l'âme. C'est ce qui fait dire de la passion qu'elle est aveugle. L'excès d'activité des vibrations n'aveugle pas seulement, mais affaiblit la volonté et une volonté faible affaiblira l'esprit et le corps.

 

C'est l'état de vibrations auquel l'homme est accordé qui détermine la note de son âme. Les différents échelons de ces notes forment une variété de diapasons que le mystique divise en trois degrés différents: le premier, qui produit pouvoir et intelligence, peut se comparer à une mer calme; le second, dont l'activité est modérée, conserve tout en mouvement, constitue un équilibre entre le pouvoir et la faiblesse, est comparable à la mer en mouvement. Le troisième degré d'activité, intense, qui détruit tout, est cause de toutes les faiblesses et les aveuglements et peut se comparer à la mer déchaînée.

 

Celui dont la vue pénètre dans l'activité de toute chose et de tous les êtres en reconnaît le diapason, comme le musicien connaît la clé dans laquelle est écrite n'importe quelle œuvre musicale. L'atmosphère qui se dégage de l'homme indique le degré d'activité de ses vibrations.

 

Si l'activité vibratoire est convenablement contrôlée, l'homme peut expérimenter toutes les joies de la vie sans en devenir l'esclave. Il est extrêmement difficile de contrôler l'activité une fois qu'elle est en route et en voie d'accroissement. Autant essayer d'arrêter un cheval emballé. Mais cependant, dans le contrôle réside l'ensemble de ce qui est appelé «Maîtrise».

 

Les Saints et les Sages répandent leur paix non seulement à l'endroit où ils se trouvent assis, mais encore dans le voisinage de leur demeure; la ville ou le pays où ils vivent est en paix, conformément à la force des vibrations émanant de leur âme. C'est la raison pour laquelle l'association avec les bons ou les mauvais, avec les classes élevées ou inférieures, a une grande influence sur la vie et le caractère de l'homme. Les vibrations de pensée, de sentiment, créent, procurent et préparent d'elles-mêmes tous les moyens nécessaires à leur manifestation en surface.

 

Quelqu'un, par exemple, peut désirer manger du poisson, et au lieu de le commander, peut y penser avec force; les vibrations de sa pensée, parlant alors aux oreilles mentales du cuisinier, lui donnent le même désir; peut-être même cette impression puissante attirera-t-elle un marchand de poisson à la maison. Les pensées des Sages accomplissent leur destinée de cette façon, suivant la force, le pouvoir et la pureté de leur esprit. Il faut un certain degré de pouvoir de pensée pour amener le résultat voulu; de même qu'il faut une certaine quantité de dynamite pour faire sauter un simple rocher et une quantité bien supérieure pour percer un tunnel à travers une montagne.

 

La durée pendant laquelle on maintient sa pensée est également importante pour sa réalisation, car les vibrations de la pensée doivent conserver leur activité durant un certain temps pour aboutir au résultat désiré. Il faut un temps donné pour cuire un gâteau; si on le fait à la hâte, il sera mal cuit; si la chaleur est trop forte, il brûlera. Si celui qui émet des vibrations mentales perd patience, même à mi-chemin du résultat ou plus près encore du succès, le pouvoir de sa pensée sera gaspillé. Si l'on donne à l'accomplissement de certaines choses un pouvoir de pensée trop considérable, on les détruit en les préparant.

 

Pour refléter pensée et sentiment sur un autre, l'homme doit observer la même règle que pour la voix et la parole. Plus quelqu'un parle haut dans une assemblée, plus il attire l'attention de ceux qui sont présents, les forçant à écouter. De la même façon, si un Soufi émet des vibrations de sa pensée et de ses sentiments, elles frappent naturellement avec grande force et puissance tout esprit sur lequel elles tombent. Comme la douceur de la voix possède un pouvoir attrayant, il en va de même de la douceur de pensée et de sentiment. Les vibrations de pensée auxquelles s'ajoute la parole voient leur force doublée; si l'on y ajoute un effort physique, cette puissance est triplée.

 

La raison est semblable au feu, elle éclaire la pensée; mais une pensée surchauffée perd son pouvoir comme la chaleur peut affaiblir le corps physique. La raison donne naissance au doute qui détruit le pouvoir de la pensée avant d'être capable d'accomplir sa destinée.

 

La force du pouvoir de la pensée consiste en confiance ou foi. La raison apporte de la confusion dans les vagues de vibrations de la pensée et le doute les éparpille; le manque de cette force qui les retient les laisse aller dans des directions différentes.

 

On ne devrait jamais penser ou parler contre son propre désir; on affaiblit ainsi les vibrations de la pensée et souvent, par là, on aboutit à des résultats opposés. Des pensées différentes surgissent au même moment, affaiblissant naturellement le pouvoir de l'esprit, car aucune d'elles n'a chance d'arriver à maturité; de même que deux jumeaux sont généralement imparfaits et que trois vivent rarement. Le manque d'harmonie entre un être et son idéal cause toujours un grand trouble dans sa vie, car ils agissent constamment l'un contre l'autre. Le fait qu'une personne parle, pense d'une autre ou ressente envers elle des sentiments mauvais ou bienveillants, touche consciemment ou inconsciemment l'esprit de cette dernière par le pouvoir de vibration. S'il nous arrive d'être fâchés contre quelqu'un sans le faire paraître en paroles ou actions, nous ne pouvons pourtant le cacher, car les vibrations de notre sentiment atteindront directement la personne en question et, si éloignée qu'elle soit, elle commencera à ressentir notre mécontentement. Il en est de même de notre amour et de notre plaisir; quoique nous fassions pour les dissimuler dans nos paroles ou nos actions, nous ne pouvons les cacher. C'est l'explication du vieux proverbe «les murs ont des oreilles». Il signifie qu'en réalité les murs eux-mêmes ne sont pas imperméables aux vibrations de la pensée.

 

Les soufis apportent une attention spéciale aux vœux, bons ou mauvais, des gens. Ils s’efforcent toujours d’attirer autant que possible les bons vœux des autres, qu’ils les estiment ou non. L’intensité de l’activité produit des vibrations puissantes nommées «Jelal» en terminologie soufie; la douceur de l'activité produit de douces vibrations appelées «Jemal». La première activité travaille comme force et pouvoir, la seconde comme beauté et grâce. Le conflit de ces deux forces se nomme «Kemal», et ne produit que destruction.

 

Le jugement de ce qui est juste ou faux, la conception du bien et du mal, l'idée de péché et de vertu sont compris différemment par les gens de races, de nations et de religions différentes; il est donc difficile de discerner la loi qui gouverne ces oppositions. Cependant, la compréhension de la loi des vibrations le rend clair. A la surface de l'existence toutes choses et tous les êtres paraissent séparés les uns des autres, mais dans chaque plan au-dessous de la surface ils se rapprochent mutuellement pour ne plus former qu'un dans le plan intérieur. Donc toute perturbation dirigée contre la paix de la moindre partie de la manifestation en surface affecte intérieurement le tout. Par suite, toute pensée, parole ou action qui trouble la paix est mauvaise, néfaste et péché; si elles apportent la paix, elles deviennent justes, bonnes et vertueuses.

 

La vie étant comme un dôme, sa nature ressemble également à un dôme. La perturbation de la plus infime partie de la vie trouble le tout et revient comme une malédiction sur celui qui en a été la cause; toute paix produite à la surface harmonise le tout et revient sous forme de paix à celui qui l'a créée. De là cette philosophie de la récompense des bonnes actions et du châtiment des mauvaises, donnée par les puissances d'en haut.

 

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