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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


L'HOMME GRAINE DE DIEU
Deuxième partie
Le Front Souriant
Chapitre 28
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


Texte original en anglais

L'homme, graine de Dieu: c'est dans ce secret que l'homme trouve la clé qui a été perdue. Cette perte montre pourquoi les religions du monde semblent perdre leur influence sur les gens, dans la partie orientale du monde aussi bien qu'en Occident. Pourquoi y a-t-il un nombre croissant d'êtres irréligieux? Pourquoi le matérialisme est-il toujours croissant? La réponse est que l'homme a perdu la clé qui ouvre le secret de la vie. C'est Dieu qui est la clé de ce secret. Durant mes voyages de quelques années dans le monde occidental, j'ai constaté, en chaque endroit du monde civilisé, que les gens se fatiguaient non seulement de la religion mais aussi de la croyance en Dieu. Il semble que le nom de la divinité soit repoussant pour un penseur évolué. Il pense que c'est quelque chose qui fut une croyance du passé: "Les gens d'autrefois qui ne connaissaient pas aussi bien la vie avaient certaines idées et maintenant nous avons trop évolué pour nous en tenir aux idées du passé." Il y en a vraiment peu qui admettront cet état de choses, et beaucoup ne le diront pas, mais presque tous le savent. En Orient, sans doute est-ce différent, mais le monde entier se dirige dans la même direction. Si la direction de l'humanité est matérialiste, alors le monde entier va dans cette direction matérielle; si c'est une direction spirituelle, naturellement le monde entier doit aller dans la direction spirituelle.

 

En dépit de tout le progrès matériel qui a élevé si haut la valeur de la civilisation aux yeux de la nouvelle génération, elle ne put rester sur son piédestal; elle s'effondra pendant la guerre. Cela a rendu le monde pensant, du moins pour un moment, conscient du fait que la civilisation qu'il avait supposé être la meilleure n'a pas fait la preuve qu'elle était la meilleure. Aucune personne juste, douée de quelque réflexion, ne niera ce fait après y avoir réfléchi. Si nous nous demandons à nous-mêmes: "Est-ce que le monde a progressé?", la réponse sera sûrement; "Oui." Les nouvelles inventions qui ont amené les phénomènes miraculeux qui ont amené tous les pays en plus proche communication par le télégraphe, le téléphone et la radio montrent toutes que l'humanité a progressé, mais qu'elle a seulement progressé dans une certaine direction, amenant un progrès qui ne peut donner toute satisfaction. Il peut seulement donner un bonheur et un plaisir extérieurs, mais le bonheur intérieur reste à trouver. Cela peut sembler être le dicton d'un croyant un peu simple que dans la croyance en Dieu se trouve le remède à toutes les maladies, mais je dirais que même la personne la plus sage peut déclarer la même chose après être arrivée à une certaine réalisation du secret de la vie.

 

Revenons maintenant à notre sujet: "L'homme, graine de Dieu." Si nous nous posons la question de savoir quelle est la définition de la graine, nous dirons que la graine est non seulement le commencement de la plante, mais que la graine est aussi l'aboutissement de la destinée de la plante, parce que la plante a sa raison d'être dans la production de la graine. Quand nous envisageons la manifestation entière comme une plante, alors, dans tous les degrés divers en lesquels elle s'est manifestée, nous voyons que l'objet final était la naissance de l'homme. L'on peut dire, concernant la plante, que la tige apparut d'abord, puis les feuilles, ensuite vint la fleur, et de la fleur vint la semence. L'on peut dire la même chose concernant la manifestation entière: il y eut le minéral, puis le végétal, puis l'animal, mais à la fin cela aboutit à l'homme.

 

Les scientifiques disent actuellement avoir découvert que la vie humaine provient de la vie animale, mais plusieurs siècles auparavant, dans les écrits de la Perse, nous pouvons trouver des déclarations apportant la preuve qu'ils connaissaient cette idée. Que nous dit cette idée? Elle nous dit que cette création entière avait pour objet de mener à bien un certain projet, un projet unique. Mais parce que tout homme n'est pas capable de comprendre ce projet, cette incapacité amène des catastrophes dans la vie. Quand une majorité comprend le projet, alors la minorité suit, mais si ceux qui connaissent le projet sont en minorité, alors la majorité suit son idée.

 

Si j'avais à peindre l'image des conditions matérielles du monde qui dirigent les hommes vers des occupations telles que la guerre, les désastres et les meurtres, sans parler de la haine entre les nations et les races, l'on comprendrait que tout cela vient du manque de compréhension de cet unique secret. Sachant cela, de grandes âmes comme Bouddha et Krishna ont toutes fait l'impossible pour l'expliquer. Par exemple, dans la Prière du Notre Père, on lit: "Que Ta volonté soit faite sur la terre comme au Ciel." Si seulement l'on pouvait comprendre le sens qu'il y a derrière ces paroles! C'est la totalité de la philosophie, car cela nous fait savoir et comprendre que cela veut seulement dire que si chaque homme a son but séparé de celui d'un autre, il y aura toujours manque d'ordre et de paix, à la fois au-dehors et au-dedans. Pourquoi les guerres se produisent-elles? Pourquoi les différends s'élèvent-ils? A cause de la différence des buts. Quand les nations ont chacune un but différent, quand chaque individu a son but différent des autres, il n'y aura pas d'unité. En même temps, cela n'est pas naturel, car le but de chaque arbre est de produire la graine, et ainsi le but de toutes les nations comme de chaque individu - le but final - est de produire cette graine qui est la source de toute la manifestation.

 

Ce ne sont pas les arbres qui ont confessé Dieu, ni les montagnes; les oiseaux non plus n'ont pas enseigné les Evangiles, ni les animaux la religion. Si jamais cela a été enseigné, si jamais l'idée de Dieu a été portée à la connaissance de l'humanité, elle l'a été par l'homme. Ce n'est pas seulement le droit d'un seul homme, mais c'est le droit de tout homme d'amener à la surface cette source, la source d'où tout est venu. Ne pensez pas que je veuille dire par là que l'on ne doive pas mener à bien ses occupations dans la vie. Ce que je veux dire est que l'on doit penser, en chaque occupation, en chaque chose que l'on fait, que la mener à bien n'est pas le seul but. Le but de l'homme est de produire dans sa vie cette graine qui est la source de sa vie entière.

 

Le psychologue moderne dit: "Fort bien; toute idée de ce genre est déjà acquise." L'on doit cependant se souvenir que l'enseigner a rendu cette idée claire, mais que l'Idéal de Dieu est la tendance innée de l'homme. La meilleure explication du mot Dieu, on peut la trouver dans le mot persan Khuda, parce que ce n'est pas seulement un nom, mais c'est le sens de l'idée; il veut dire: "révélé par lui-même." Cela même indique que si Dieu Se révèle par Lui-même, alors l'homme ne dépend pas toujours de l'enseignement d'un autre; son attente naturelle est pour Dieu.

 

 

J'ai bien souvent rencontré des gens dépourvus de croyance en Dieu, mais j'ai toujours constaté qu'il y avait une certaine nostalgie à l'arrière-plan. Bien qu'ils la nient, la nostalgie est là tout de même. En dehors de cela, l'homme est vaniteux et une fois que sa vanité s'est saisie de l'idée d'incroyance, il est très difficile de rendre sa vanité croyante à ce que son âme désire. Parfois un être se sent fier de penser: "Je ne crois pas ce que tout le monde croit parce que je suis plus intelligent et que je suis différent des autres." Cependant, beaucoup parmi ceux qui toute leur vie ont nié l'idée de Dieu, après être passé par une sorte de chagrin, après avoir eu le coeur brisé, après avoir subi un désappointement, ou après être passés par la vie, ont à la fin commencé à chercher quelque chose quelque part. J'ai été très intéressé de voir comment un grand savant matérialiste dépendait souvent de sa femme qui était croyante en l'idéal de Dieu. Elle avait une sorte de pouvoir d'influence guérisseuse durant sa maladie, et, pendant ses accès de dépression, elle était une consolation. Chaque fois qu'elle disait: "Tu ne crois pas en Dieu, ainsi comment peux-tu être heureux?", il répondait: "Mais tu crois en Dieu et je crois en toi; ainsi c'est la même chose."

 

Par là, je ne veux pas dire que la croyance en Dieu soit suffisante pour notre vie. La croyance en Dieu est seulement une première marche; c'est la première marche vers l'accomplissement du but pour lequel cet univers entier est formé. Si, par sa croyance en Dieu, une personne est satisfaite, bien - mais il y a des millions et des millions qui croient en Dieu et qui ne sont pas tous des saints, et ils ne sont pas non plus les meilleurs des êtres. L'on peut peut-être trouver parmi ceux qui semblent être incroyants des gens plus vrais et plus justes que parmi ceux qui ont cette croyance. Néanmoins, pour un penseur, pour une personne sage, l'Idéal de Dieu est la clé du secret de la vie. La personne qui s'en tient à sa croyance est comme quelqu'un qui reste sur une marche au lieu de se déplacer dans l'escalier. Mais la personne qui monte les marches est celle qui atteint à une réalisation qui ne peut venir que par la croyance en Dieu. Par conséquent, il y a bien des gens dont les pieds sont, pour ainsi dire, collés dans le chemin de la vérité. Ils ne sont ni dans le monde ni dans les Cieux; ils sont collés à leur croyance et n'en bougent pas.

 

La première chose que nous ayons à apprendre grâce à la croyance en Dieu est de connaître la source. Aussitôt que nous connaissons la source, nous commençons à sentir différemment par rapport à la personne ordinaire. La différence entre la personne qui est sage en Dieu et la personne qui est sage selon le monde, si toutes deux semblent bonnes, est celle-ci: la personne qui est du monde dira: "Si je fais du bien à quelqu'un d'autre, c'est pour moi un plaisir et l'autre apprendra aussi à faire le bien." Mais l'homme qui est sage en Dieu dira: "Quand je fais du bien à cette personne, cela signifie que je me fais du bien à moi-même." Cela fait une grande différence, car quand un être réalise la source, il devient un avec un autre, et, quand il ne se rencontre pas avec un autre dans la réalisation de cette source, alors une autre personne est une autre. Il y a deux idées en cela: il y a une idée d'unité et il y a une idée de dualité. L'idée d'unité vient de la réalisation de Dieu qui est la vérité ultime. L'idée de dualité vient de l'absence de cette connaissance, et si l'on n'a pas atteint, à travers l'idée de Dieu, cette idée d'unité, la réalisation n'est pas complète. Si l'on a la croyance en Dieu, mais que l'on ne soit pas arrivé à cette idée d'unité, l'on n'a pas accompli le but de la vie.

 

Par conséquent, l'objet du mouvement soufi est de servir l'humanité en vue de ce but. Ce n'est pas une nouvelle religion, ce n'est pas une certaine caste ni un credo. C'est seulement l'éveil des gens de toutes les religions diverses ou d'aucune religion à l'idéal divin, d'éveiller l'humanité à la compréhension de la vérité, que l'on doit apprendre par la compréhension de Dieu, spécialement après une telle période par laquelle l'humanité est passée, tandis que la haine qui existe dans le coeur des hommes les uns pour les autres croît sans cesse. Les gens ont connaissance de diverses maladies, mais ils ne connaissent pas la pire des maladies du monde, qui est la maladie du coeur, et il semble que cette peste s'étende largement: la méchanceté du coeur. Si l'on pouvait seulement se rendre compte quel effet psychologique la pensée du mépris, de la haine, de la rancune possède sur l'homme! Ce ne sont pas seulement les causes externes qui rendent malades les individus, mais énormément de maladies viennent de raisons internes. Accepter la méchanceté, et la garder dans le cœur, est pire que de garder une goutte de poison dans le corps.

 

Maintenant est venu le temps où l'humanité, après son absorption dans le gain matériel, doit considérer un autre gain. Les gains matériels sont enlevés en l'espace d'un moment et laissent l'homme dans sa tombe sans aucun d'entre eux. Cette terre n'a même pas conservé la fortune des pharaons, si chère à leur coeur; après tant d'années, la richesse qui fut enterrée avec eux leur a été enlevée. Cela montre que ce monde n'a jamais permis à quiconque d'avoir ce qui lui appartient pour toujours. C'est un monde décevant; la vraie consolation de l'homme n'appartient pas à la terre ou à la connaissance de la terre. Cela ne veut pas dire que la connaissance du monde est inutile, mais que la connaissance du monde ne suffit pas au but entier de la vie. Il n'y a qu'une chose d'où puisse provenir une vraie satisfaction, et c'est la connaissance du côté plus profond de la vie, la connaissance de la source et du but de toutes choses. C'est la réalisation de cette connaissance que l'on peut appeler la lumière divine, et s'il y a un bonheur, une paix que l'on puisse jamais trouver, elle réside en cela. En l'absence de cela, le bien que la terre peut offrir ne suffira pas au but de l'homme. Qu'un homme soit jeune ou vieux, qu'il soit sage ou non, la vie de chaque personne a besoin de guidance spirituelle, et le seul objet que l'homme ait à accomplir aujourd'hui est de faire connaissance avec son propre être par la connaissance de lui-même et la croyance en Dieu.

 

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