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Khalifa Nargis


PERDRE SON INDIVIDUALITE
Le Vin de la Taverne
Khalifa Nargis


Texte original en anglais

 "Notre esprit céleste est libre dans l'Éternité,
Bien que pour un court moment nous ayons forme et figure d'homme"

Shams Tebriz

 

Essayer d'interpréter le Nirvana en paroles est inutile, car ceux dont l'oeil spirituel est ouvert savent, et par conséquent n'ont pas besoin d'explication, quant à la majorité, qui fait de toute vérité vivante un fait mort, sa signification réelle sera toujours mal interprétée.

 

La conception suivant laquelle l'homme doive un jour perdre son individualité est si inacceptable pour l'esprit ordinaire qu'il n'imagine pas qu'une telle éventualité soit possible, et d'une façon générale l'homme ne désire pas croire ce qui est au-delà de sa compréhension. La vérité contenue dans l'ancienne philosophie mystique, selon laquelle, à la fin de la manifestation, tous les êtres seront absorbés dans l'Un, d'où ils sont venus, et aucune individualité ne restera, n'est ni concevable, ni attractive pour de tels penseurs. A tel point que cela fut responsable d'une école de pensée qui enseigne l'impérissable individualité de l'homme. En réalité ces deux enseignements sont justes d'un certain point de vue. "Les enfants, non pas les Sages parlent du Sânkhya et du Yoga comme étant différents; celui qui voit, voit que le Sânkhya et le Yoga sont un" (Bhâgavad Gîta). La difficulté gît dans l'ignorance qu'a l'homme de la vraie conception de l'être humain. Une âme humaine ne peut pas retenir d'individualité en tant qu'être humain, car l'homme est une expression, ou une manifestation de l'âme pour un temps limité et pour un but spécial; quand l'heure sonne et que le but est accompli, l'âme voyage bien au-delà de la limitation humaine.

 

La glace ne peut pas conserver son individualité en tant que glace, l'eau devient glace pour un certain temps et pour un certain but, mais ne peut jamais perdre son identification avec l'eau. Quand "La goutte de rosée glisse dans la mer étincelante" elle est faite une avec la conscience de l'océan, et n'en peut être distinguée. Bien qu'hors de l'océan des gouttes de rosée innombrables puissent sortir et retomber, elles ne sont gouttes de rosée que durant leur séparation d'avec leur origine. Quand elles reviennent à Cela d'où elles sont venues, leur individualité de gouttes est résorbée; mais il n'y a aucune perte dans cette immersion, la perte réelle n'existe que pendant leur limitation en tant que gouttes séparées.

 

L'homme est souvent repoussé par l'enseignement de l'annihilation, mais ce n'est que tant qu'il est ignorant de sa réelle signification. Il est vrai que le Chemin finit en annihilation; mais annihilation de quoi? Non pas de la vie, non pas de l'être, non pas de la conscience, qui sont tous mille fois accrus, car la perfection de tout est atteinte, mais annihilation de l'être séparé, que le mystique cherche volontairement parce qu'il a rencontré celui-ci face-à-face, l'a vu avec l'oeil de l'esprit, et a par conséquent compris sa valeur et son utilité véritables.

 

Le mystère du moi doit être dévoilé par chacun de sa propre main, afin que la lumière qui est derrière toute illusion lui montre la vérité intérieure de son propre être.

 

"Le moi de la matière et le moi de l'esprit ne peuvent jamais se rencontrer. L'un des deux doit disparaître; il n'y a pas de place pour les deux" ("La Voix du Silence").

 

Celui qui n'aime pas l'idéal de la perte du petit moi dans le Moi Divin, et désire conserver sa propre individualité après la mort du corps n'a pas besoin d'avoir peur, il verra certainement son désir accompli, aussi longtemps qu'il le désire; mais tôt ou tard ce désir changera, car le fardeau qu'il est lui-même sera plus qu'il n'en peut porter. Qui aurait le courage de regarder en face, avec une vision claire, une Vie Éternelle enfermée avec sa propre individualité, pour ne jamais être libérée de sa geôle de ses souvenirs, de ses propres idées, de l'ombre des erreurs et des fautes de toute sa vie?

 

La plus grande joie que puisse éprouver un être humain, on la trouve non pas dans la possession, mais dans l'abandon de soi; car dans l'acte suprême du don de soi, l'on devient non plus un esclave, mais un homme libre.

 

Aussi longtemps qu'un homme retient ce qu'il ne peut pas abandonner, il reste avec ses possessions, aussi sûrement retenu par elles qu'un prisonnier est retenue par les chaînes qui l'attachent; mais dans l'ignorance de cela, l'homme se garrotte lui-même encore plus sûrement avec les liens de la fausse identification, criant dans ces liens: "Qui me délivrera de ce corps de mort?", blâmant Dieu ou le destin, ou son prochain pour leur incapacité à le délivrer. Il n'y a, cependant, aucun pouvoir sur terre, dans les Cieux ou en Enfer qui puisse libérer un homme de lui-même, hormis l'abandon de ses propres idées au sujet de lui-même. Aussi longtemps qu'il pense: "Je suis un individu séparé, à part et indépendant soit de Dieu, soit de mon prochain", il restera prisonnier du moi. L'homme est hélas aveuglé par la grande ombre de sa propre importance; s'il pouvait seulement réaliser l'origine et la destinée véritables de l'âme comme une partie d'un puissant Tout, et grâce à l'abandon de soi partager la conscience de ce Tout, au lieu d'être seulement conscient de la partie infinitésimale, il trouverait non seulement la liberté, mais le Royaume et la Puissance et la Gloire.

 

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Le Vin de la Taverne       L'annihilation du faux ego

 

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