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LES RÉFLEXIONS
SUR L’ÂME |
On peut comparer l'âme à une chenille. De même que la chenille réfléchit toute la beauté des couleurs qu'elle voit, et, à partir de là, devient un papillon, ainsi en est-il de l'âme. Lorsqu'elle se trouve dans le monde angélique, elle reflète la beauté angélique en se manifestant sous la forme d'un ange; lorsqu'elle est dans le monde des djinns, elle reflète les caractéristiques des djinns en revêtant la forme du djinn; lorsqu'elle est dans le monde des hommes, elle reflète les traits humains, et se manifeste alors sous la forme humaine. Si la chenille reçoit l'impression d'une seule forme ou de plusieurs formes de feuilles et de fleurs, et de diverses couleurs, elle les reflète et elle leur devient semblable. Vous observerez souvent qu'une chenille, devenue papillon, a la même couleur que ce qui l'entoure, feuilles ou fleurs, ou tout ce qui se trouve devant elle. Elle devient telle, elle ne prend pas la couleur et la forme des arbres et des fleurs qui sont à distance, avec lesquels elle n'a pas été en contact. Il en est de même pour l'âme. De tout ce qu'elle touche, elle prend les caractéristiques, les couleurs, le parfum, et ensuite elle les réfléchit, et devient ce qu'elle reflète.
Ceci nous prouve que cette «qualité miroir» que possède le cœur ne paraît pas seulement lorsque l'âme est sur la terre, mais se présente dès que l'âme commence à s'aventurer vers la manifestation. C'est pourquoi la captivité, aussi bien que la liberté, viennent de l'âme elle-même. Ainsi que le dit un poète persan: «C'est Toi-même qui deviens captif, et c'est encore Toi seul qui Te libères de cette captivité».
Ces deux conditions - la captivité dans ce corps d'argile, et la libération de cette terre dense -, l'âme les provoque elle-même, et ceci par l'action d'une seule loi, qui est la loi de réflexion. Il peut y avoir des idées différentes, dans les dogmes ou les spéculations, que les sages ont formulées sur la venue de l'âme sur la terre, et son retour d'ici-bas; mais les êtres réfléchis, si différents soient-ils dans leur conception de la loi divine de la nature, ne peuvent dénier un instant cette loi fondamentale, qui agit comme un facteur de grande force dans le voyage de l'âme vers la manifestation, et son retour vers son but.
C'est la raison pour laquelle il est naturel au mystique de penser: «Ce qui est passé est passé, ce qui est fait est fait, je ne m'en soucie plus. Ce qui m'occupe est de rendre le moment présent tel que je le souhaite, et d'aplanir le chemin qui conduit à ma destination future». Sur ce principe est basé tout le mysticisme. Le Soufi est peu concerné par ce qui s'est passé hier. Dans le cas où la connaissance d'hier a une relation avec la vie d'aujourd'hui, et peut aider à l'améliorer, alors seulement il consulte le passé, mais pas par intérêt du passé. Omar Khayyam dit: «Demain? Demain, je serai moi-même avec les sept mille ans d'hier».
Ce qui veut dire: «Si je vivais sept mille ans durant dans le passé, quelle importance pour le présent?». Le problème principal qui se présente à l'homme est: «Aujourd'hui, à cet instant précis, comment puis-je rendre ma vie meilleure pour moi-même et pour autrui ?». Si l'homme se consacre à cette science, le temps lui fera défaut; toute sa vie sera occupée à tirer le meilleur parti du moment présent, car c'est le moment présent qui se répète, et c'est ce présent qui fait le futur.
De plus, c'est l'étude et la pratique du phénomène de la projection- réflexion qui nous permettent d'atteindre ce que chaque âme recherche. Zeb-un-nissa, la poétesse persane a dit: «Si
tu penses à la rose épanouie, tu deviendras une rose;
On pourrait se demander: «Pourquoi un moustique ne devient-il pas un papillon? Car un moustique, lui aussi, séjourne parfois parmi de belles plantes et fleurs». La réponse est que le moustique n'est pas intéressé par l'écoute, parler seul l'intéresse. Il n'apprend pas, il enseigne! Ainsi il demeure dans le même état. La chenille, au contraire, est silencieuse, se déplace avec douceur, elle se tient tranquille et sait méditer. C'est pourquoi finalement elle devient un papillon.
Question: N'y a-t-il pas deux façons de vivre dans le présent: la vie purement physique, et la contemplation de ce qui est éternel. Comment équilibrer les deux? Réponse: En étant conscient des deux: ne pas se plonger si profondément dans l'éternel, qu'on ne sait plus l'heure qu'il est; et ne pas s'immerger dans la vie physique, au point de perdre conscience de son immortalité. De même qu'il y a le jour et la nuit, ainsi la conscience va du physique au spirituel, et du spirituel au physique. C'est la même chose pour l'action et le repos; en gardant l'équilibre entre ces deux états, on vit une vie complète.
Question: Comment se fait-il qu'une âme reflète les caractéristiques d'un assassin, et une autre celles d'un saint, toutes deux étant également d'origine divine? Réponse: Nous avons comparé l'âme à une chenille qui reflète d'abord, et devient ensuite ce qu'elle a reflété. Il en est de même pour l'assassin et le saint. Mais pourquoi une personne reflète-t-elle un assassin? C'est que, petit à petit, elle s'est mise en condition de recevoir cette projection-réflexion. En essayant de blesser, de nuire ici et là, en cherchant à être aveugle à cet aspect de son être, et en voulant faire du mal à autrui, elle est devenue telle progressivement. Il arrive qu'un assassin reflète la pensée de quelqu'un d'autre de ce monde, ou de l'au-delà. Ce reflet fut projeté par quelqu'un qui était un ennemi de la personne assassinée, et l'assassin n'était qu'un instrument. La question est: «Est-il ou non responsable de son acte?». Oui, il l'est, car il a préparé son mental à recevoir cette projection-réflexion.
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