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Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


L'ESPRIT-GUIDE
Pir-o-Murshid Hazrat Inayat Khan


 

Dans l'idée du mystique, la création entière est une sorte de voyage de l'Être Infini depuis les plans les plus intérieurs jusqu'à cette terre; et, dans ce voyage, Dieu Lui-même, pour ainsi dire, voyage à travers les divers plans d'existence, et après des années sans nombre, arrive à la condition des êtres humains. Dieu qui est unique dans son état d'être originel devient multiple sous des noms et des formes variés. Mais la nature de cette création de variété est enivrante. Et cette ivresse retient toutes les créatures dans une sorte de brume dans laquelle elles ne peuvent pas bien voir; dans laquelle elles ne savent pas que faire, quel est leur devoir, ce qu'elles veulent vraiment, quel est leur but; et cela est non seulement le cas des créatures inférieures, mais même l'humanité a cette impression d'être dans le brouillard. Et ce qui rend principalement l'homme perplexe, c'est la raison pour laquelle il est ici, pour laquelle il a été envoyé sur la terre, quelle est sa mission dans la vie, comment il peut l'accomplir, quel est son devoir, quel est le secret de la nature, quelle est la meilleure chose à faire dans la vie. En dehors de diverses causes de perplexité, l'homme a des ambitions, il a des besoins dans la vie, il a les nécessités de son existence physique, son existence mentale a ses besoins, son cœur sent qu'il a besoin de quelque chose, et ce besoin existe aussi dans son âme.

 

Et puis chaque homme a son occupation dans la vie, du matin au soir, qui diffère de celle d'un autre, qui l'absorbe toute la journée. Gagner sa vie, lutter pour les choses du monde, l'absorbent trop pour penser et pour comprendre qu'il doit savoir comment accomplir le but de sa vie, mais il arrive des heures ou des jours ou des moments où vient la souffrance.

 

Il arrive une grande épreuve, un coup très dur, et, à de tels moments, l'homme se sent comme réveillé et pense à ces choses. Il demande alors où il est, quel est son devoir et s'interroge sur l'impermanence de la vie et il se rend compte de la moindre importance de ce à quoi il en attachait tant. De tels moments arrivent rarement dans la vie. Souvent ces moments sont comme des vagues qui passent. Ils bouleversent la vie, mais lui les oublie bientôt. Tel est l'homme. Dès qu'il a un verre de vin il est bientôt ivre, et ainsi en est-il de tous les aspects de la vie. Dieu représente Son propre Être dans un arbre, dans une plante, dans un roc, dans les montagnes, dans le germe, le ver, dans toutes les choses qu'on peut nommer; toutes elles représentent Dieu. Et Dieu, Qui est parfait en sagesse, dans ce voyage trouve l'obscurité. Mais le plan du Créateur est merveilleux.

 

Quand un fermier doit se déplacer dans l'obscurité de la nuit, il prend une lanterne, car il a besoin de lumière pour marcher. Il allume sa lanterne pour l'accompagner dans ses déplacements, sachant qu'il doit marcher dans la nuit. Ainsi fait le Créateur Tout-Puissant dans son voyage en ce monde, en Sa propre immanence pour ainsi dire: pour pouvoir voir dans cette obscurité, pour qu'Il puisse voir la route, Il allume sa lanterne. Et on appelle celle-ci l'Esprit-Guide.

 

A toutes les époques, c'est cette lanterne qui a montré clairement le chemin à ceux qui marchaient dans l'obscurité de la nuit. Cette lanterne était portée par quelqu'un; et quel qu'il fût, il était lui-même la lanterne, le Porteur; et quiconque était la lanterne, son cœur était le serviteur de l'humanité en montrant aux âmes perdues leur chemin à travers l'obscurité. Comme on lit dans la Bible: "Frappez à la porte et on vous répondra", ainsi cette lanterne qui est l'Esprit-Guide, quel qu'en fût le porteur, a été la réponse donnée aux individus et à la multitude aux périodes où cela était nécessaire, pour ceux qui manquaient de lumière dans les époques d'obscurité.

 

Cependant il ne fait pas toujours nuit. Il y a une partie du temps où il fait jour, et, au moment où il fait jour, la lanterne n'est pas nécessaire, la lumière est là. Mais vient ensuite la période d'obscurité, et en ce temps-là on recherche la lanterne.

 

La lanterne a montré le chemin, que le porteur de lanterne ait été appelé Abraham ou Salomon ou David, que ce fût Moïse ou Jésus ou Mohammed, qu'on l'ait appelé Bouddha ou Krishna ou Shiva ou Rama. Ce fut le porteur de la lanterne au moment où le monde en était en manque. Le cœur de la personne qui l'apportait, les gens ne le voyaient pas. Ils voyaient son visage, et ils voyaient son nom et sa forme. Ils ne voyaient pas la flamme, mais la lanterne; avec la conséquence qu'après qu'elle eut montré le chemin, alors la lanterne disparut et les gens oublièrent la lanterne et sa lumière. Mais ils se souvinrent du nom. Et s'accrochant à ce nom, s'imaginant que c'était la lumière, croyant en lui, lui étant fidèles, ils se combattirent d'âge en âge, pour la raison que certains avaient vu une forme particulière et entendu un nom particulier et que d'autres s'accrochaient à une autre forme et à un autre nom. Pour la même lanterne, ils se souvenaient de noms et de formes différentes. .

 

Par exemple, après que Moïse eut été le porteur de la lanterne qui devait guider l'humanité en temps de besoin, quand il eut passé de ce monde et que revinrent la nuit et l'obscurité et le besoin de montrer à nouveau le chemin, et d'allumer de nouveau la lanterne, la lanterne fut apportée par Jésus. Quand il vint, les gens dirent: «Voici un nom différent et une différente image». Ceux parmi lesquels il apporta la lanterne dirent que ce n'était pas la même. Ils dirent: "Ce n'est pas Moïse, ce n'est pas celui qui nous attendions, ce n'est pas l'homme autorisé; il ne vient pas de notre synagogue particulière, ce n'est pas lui que réclame notre peuple".

 

Il y en eut quelques-uns, cependant, qui virent la lumière. Quelques-uns seulement la suivirent; et parmi ceux qui suivirent la lumière, quelques-uns suivirent le nom et la forme au lieu de se souvenir de la lumière. De la lumière qui possède tant de globes de diverses couleurs, l'on se souvient seulement de la couleur extérieure. Ce sont seulement les mystiques qui, à toutes les époques, ont vu que c'était la même couleur et ont appelé cette lumière: «lumière spirituelle». Pour eux, c'était ce qui importait, et peu importait l'individualité qui avait apporté la lumière pourvu qu'on la voie. C'est la lumière qui importe, non pas la lanterne, non pas la personne. Ainsi en fut-il du temps de Zoroastre, ainsi en est-il à présent.

 

Plus il y eut de personnes qui purent voir cette vérité, et plus de cette force, plus de cette lumière purent être données, qui à présent sont perdues. Mais il en fut toujours ainsi lorsque la lumière fut donnée. Elle a toujours été refusée et ainsi la lumière divine a été perdue pour ceux-là. L'humanité a toujours montré, à quelque période que ce fut de la civilisation, que les travailleurs pour cette Cause, malgré leur fidélité, ont souvent travaillé au désavantage de la lumière divine. Quand elle a été donnée, elle a été refusée quand on en avait besoin. Chaque fois qu'il arriva que la lumière fut donnée, la lumière fut refusée. Et par qui? Toujours par ceux que cela concernait davantage que la multitude, par leurs organisations, leurs institutions, leurs travailleurs sociaux dont cela eut été le rôle de l'accueillir pendant qu'elle était sur la terre. Ils attendaient qu'elle vienne du ciel, peut-être accompagnée d'une procession d'anges avec des tambourins et tout un étalage. Mais chaque fois qu'elle vint, elle vint tout à fait de la même manière que dans le temps de Moïse, elle vint comme chaque mortel, comme chaque humain mortel vient sur terre, et non pas accompagnée de campagnes publicitaires, de bruit ou d'honneurs. Comme la même lumière présente en chaque homme mortel, sujet aux folies, aux erreurs, afin de comprendre ce que la terre donne à apprendre, ainsi vint le porteur de la lanterne. Son but était d'apporter la lumière, de donner la lumière au moment où elle manquait. Imaginez le peuple juif même aujourd'hui, (moins en Occident qu'en Orient), attendant le Porteur de lumière, et combien de ceux-ci vinrent et s'en allèrent et combien le feront encore. Pourtant ils attendent, les yeux fixés sur certains prêtres, que ceux-ci désignent le Porteur de lanterne authentique. Ainsi en a-t-il été de nombreuses fois, et en sera-t-il, après que la lumière soit apparue aux époques où elle manquait.

 

Et quand cette lumière est venue, cela n'a pas produit un mince effet; des millions ont été guidés. Pensez au nombre des âmes qui ont été éclairées dans l'Islam, combien l'ont été par Krishna, pensez à Moïse et à Jésus, à Zoroastre, et combien d'êtres conservent leur amour et leur estime pour leur prophète. Et si vous demandez à n'importe qui d'entre eux: "Acceptez-vous celui que vous connaissez?", il y aura toujours la même réponse: "C'est seulement lui que je reconnais. Si vous en adorez un autre, vous insultez celui que nous honorons". Tous répondront de la même manière. En conséquence de quoi, il y eut des luttes pires époque après époque entre les fidèles de certaines races, de différents credos.

 

L'intention qu'il y avait en apportant la lanterne avec la lumière n'était donc pas pleinement réalisée. L'intention n'était pas que le nom fut suivi. Ainsi vinrent des guerres bien pires et de pires sacrilèges. Même à présent, ce sentiment de haine opposant l'un à l'autre existe, et cela apporte-t-il la lumière? Cela ne fait qu'attirer l'obscurité et crée l'ignorance. Si quiconque peut sonder la profondeur de sa propre religion, s'il y réfléchit, il trouvera la vérité dans chaque religion existante, et il comprendra certainement. Est-ce que la Vérité appartient à une confession particulière ou non? Dieu est en Lui-même Vérité. Dieu n'est pas pour une section de l'humanité. La Vérité est en toutes les créatures, elle est créée en toutes. Son intelligence divine, Sa vie, peu importe d'où elles viennent. C'est toujours une seule source, c'est Dieu, peu importe sous quel nom et sous quelle forme.

 

Mais quant au porteur de la lanterne, c'était son devoir de donner la lumière aux êtres humains. Est-ce que cette lumière appartient à une lanterne particulière? Non pas, mais en temps d'obscurité la lanterne est la source, la source de la lumière qui brille en elle. La lumière n'est pas seulement dans la lanterne, car la lumière se répand largement partout. Par conséquent, la personnalité est la lanterne, et la lumière est en elle. Appelez-la Christ, mais alors Jésus doit être considéré comme la lanterne. Cependant la lumière qui apparut était étendue, et c'est cela qu'Il voulait signifier en disant: «Je suis l'alpha et l'oméga». Autrement Il aurait dit: "Je suis né en telle année, ni avant, ni après. Le premier et le dernier, je ne les suis pas, je suis au milieu". Il mentionna la lumière qu'il apportait lorsqu'il en parla comme de l'alpha et l'oméga; et c'est cette lumière qui est appelée dans la terminologie mystique l'Esprit-Guide. En réalité c'est la Lumière de Dieu Lui-même. Ou bien l'on peut dire que c'est l’œil de Dieu, la vue de Dieu qui voit. La vérité se trouve même dans la perplexité de chaque âme; personne n'est dépourvu de cette lumière à un degré plus ou moins grand. Par exemple, de même que certains objets dans une pièce réfléchissent davantage que d'autres la lumière, ainsi en est-il de cœurs différents: tel est le cœur, telle est la réponse.

 

Le côté le plus difficile de l'humanité est que l'homme est fier par nature, plus prompt à reconnaître Dieu dans un objet que dans une personne, que dans son frère. Quand la lumière fut née dans le Porteur de lumière et qu'Il étudia l'homme, Il constata que l'homme est trop orgueilleux pour donner ce caractère sacré à son frère;, par conséquent Il dit: "Ici il y a un Dieu, courbez la tête devant Lui". Et qu'est-ce que c'était? C'était une idole de pierre ou de roc. Et pensez-vous que ce fut le cas seulement dans les anciens temps, dans le passé? C'est la même chose encore maintenant. Il y en a qui ont quelque objet de bois et disent que c'est magnétique, que c'est quelque chose à mettre dans un sanctuaire, quelque chose de très important. Mais écouter son frère? Non, l'homme écoute plus volontiers la pierre morte que quelqu'un qu'il pourrait aimer. Et pensez-vous qu'il n'y en ait qu'un petit nombre? Ils sont nombreux, il y en a une foule.

 

Un jour j'étais à un certain endroit en Angleterre, dans un village, et j'étais en visite dans un cercle de méditation où je devais parler à quelques gens instruits. Quand j'arrivai dans la pièce, on m'amena à ma place et quelqu'un vint à moi et dit: "Je puis vous faire confiance, par conséquent je vais vous montrer un secret", et il m'amena près d'une cheminée et dit: "Maintenant regardez là, et vous comprendrez". Mais il n'y avait là rien d'extraordinaire. Et vous pensez bien que je me demandais ce que cela voulait dire. Je pensai que j'étais trop matériel pour voir la chose. Je ne voyais pas le caractère sacré du manteau de cette cheminée. Mais après tout cela, à la fin, je trouvai le fin mot de l'histoire, ce qui se cachait derrière. Une dame avait fait un rêve merveilleux et c'était son rêve qui avait eu cet effet. Et c'est bien cet effet que la vie du monde a sur les êtres humains. Mais en réalité l'homme ne peut trouver un Dieu à adorer nulle part sauf dans l'humanité, dont le corps est le seul temple pour adorer Dieu en esprit. La beauté de Dieu et de Sa nature, si on peut la voir quelque part, c'est dans la belle personnalité de l'être humain, dans ce qu'il a pensé et qu'il a apporté dans sa personnalité et qui est tellement plus grand. C'est le Dieu vivant qu'il a apporté en elle. Il est beaucoup plus difficile d'imaginer l'invisible que d'imaginer ce qui se manifeste dans la personnalité des hommes.

 

Qu'y a-t-il d'important dans le sacrement du vin en tant que sang, du pain en tant que chair: ce n'est pas la cérémonie, c'est le sentiment de la personnalité qui est une réflexion de Dieu dans un miroir parfait; et si quelque chose peut donner un enseignement, c'est cette réflexion de Dieu dans l'humanité. Si jamais on peut la voir, c'est toujours dans la personnalité de l'homme. Il y a des milliers d'années que Bouddha est passé de cette terre, et elle est restée dans sa personnalité qui garde ce parfum sur la terre. Qu'en est-il du Christ après Dieu sait combien de siècles de légendes qui nous sont venues par Saint Paul et qui forment un Livre, qu'en demeure-t-il? C'est l'impression de Sa personnalité, l'atmosphère qui est à l'image de la Lumière, et qui nous est restée aujourd'hui. Cependant, ce que les gens demandaient, ce sont des miracles, et chaque fois que la lanterne vint et fut éprouvée, il y eut cette demande de miracles, et ainsi des histoires prirent la place de la lumière. Tout un chacun s'intéressait aux miracles, mais l'espèce naturelle de miracle logique était la présence des porteurs de la lanterne. Or l'important pour les gens n'était pas de croire ceci ou cela, c'était la présence de Dieu vivant qui parlait de Dieu devant eux. Ce n'était pas non plus le travail littéraire, le Livre; l'important, c'est la lumière vivante, la vie elle-même. Le miracle a toujours été celui-ci: que la présence des porteurs de lanterne rendait claires les choses, et même les problèmes difficiles. Ils parlaient avec leurs mots simples, et leur présence faisait que les gens comprenaient la Vérité. Or il n'y a pas de preuve de cette Vérité, elle appartient à chaque âme. Mais qui sont ceux qui ne peuvent pas la voir clairement?.

 

La même lumière brille sur le monde entier, ce n'est pas quelque chose de nouveau que vous pouvez obtenir, elle est là toujours. Les gens pensent qu'ils peuvent la voir dans les mots: c'est très étonnant. Les mots ne sont rien, ils sont le vêtement extérieur de l'Esprit qui apporte la lumière et la vie au moment où l'humanité s'égare. Et si elle s'égare, c'est par manque de réalisation de la lumière, qui, quand elle est donnée, suffit aux besoins de son époque.

 

Le travail principal des Soufis est de faire comprendre qu'un meilleur temps peut venir. Ils peuvent s'unir dans cette cause commune.

 

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L'Esprit-Guide La réflexion créatrice

 

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