LA CONSIDÉRATION |
Murawwat est une vertu qu'il est très délicat d'exprimer par des mots. Elle consiste à retenir son action par respect pour un autre, que ce soit par considération pour son âge, sa situation, ses connaissances, sa bonté ou sa piété. Ceux qui pratiquent cette vertu n'ont pas seulement ce respect envers quelqu'un de haute situation ou de grande piété: quand ils développent cette qualité, celle-ci se manifeste dans leurs rapports avec toute personne.
Murawwat est le contraire de ce qu'on appelle brusquerie. Ce n'est pas nécessairement respect. C'est quelque chose de plus délicat que le respect, c'est à la fois considération et respect. Cette vertu dans son plein développement peut même s'élever jusqu'au point où, par considération et respect, l'on essaie de supporter le manque de cette même vertu chez un autre. Mais quand on arrive à ce stade, alors le comportement ordinaire cesse et le comportement de la sagesse commence.
L'homme n'est pas seulement né en ce monde pour manger, boire et s'amuser. Il est né pour arriver à la plénitude du caractère humain, et il y arrive par une plus grande réflexion et considération. Sans quoi, même s'il possède pouvoir, situation, fortune, culture et toutes les bonnes choses de ce monde, il reste pauvre s'il n'a pas la richesse de l'âme qui est la bonne manière. Toute la beauté qui entoure l'homme est quelque chose qui lui est extérieur; la seule beauté dont il puisse dépendre se trouve et se développe dans son propre caractère.
Quelqu'un peut manquer de murawwat, sinon dans ses paroles, du moins dans son regard. Il n'a pas besoin de parler pour se montrer rude: dans son regard, dans sa manière de se tourner et de se détourner, de se lever ou de marcher, de fermer la porte ou de quitter la pièce, il peut montrer ses sentiments; si l'homme ne parle pas, il fait parler la porte. Ce n'est pas une question facile de se conduire lorsque le mental s'échappe de notre emprise. Pour parler clairement, murawwat consiste à agir avec considération et respect pour un autre dans une situation où une impulsion brutale se fait jour; c'est se contrôler, se retenir de commettre une insolence, par respect pour un autre.
Des idées délicates comme celles-ci sont très difficiles à apprendre et à pratiquer dans la vie. En ce jour, beaucoup peuvent se demander si elles ne sont pas faiblesse. Mais aucune chose en ce monde ne peut prouver qu'elle est faiblesse dès lors qu'on peut seulement la pratiquer par la maîtrise de soi-même. Il n'y a aucune perte lorsqu'on montre respect ou considération à quelqu'un qui ne les mérite pas; car si une telle action n'apporte aucun profit, elle est cependant pratiquée - et c'est la pratique qui rend l'homme parfait.
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